Travail des enfants et travail domestique

Qu’est-ce que le travail domestique?

Selon la Convention nº 189 le «travail domestique» désigne le travail effectué au sein de, ou pour un ou plusieurs ménages, et «travailleur domestique» désigne toute personne de genre féminin ou masculin exécutant un travail domestique dans le cadre d’une relation de travail. Le terme «travail domestique» couvre un ensemble de tâches et services qui varient de pays à pays et qui peuvent être différents selon l’âge, le sexe, l’origine ethnique et le statut migratoire des travailleurs concernés, ainsi que selon le contexte culturel et économique dans lequel ils travaillent. Ceci signifie qu’une définition du travail domestique, et des travailleurs qui y sont impliqués, fondée uniquement sur les tâches à réaliser, risque d’être perpétuellement incomplète. La Convention nº 189 se fonde plutôt une caractéristique commune et distinctive, à savoir le fait que les travailleurs domestiques sont employés par des ménages privés tiers et qu’ils leur fournissent des services.

Qu’est-ce que le travail domestique des enfants?

Le «travail domestique des enfants» fait référence au travail effectué par des enfants dans le secteur du travail domestique, chez un tiers ou un employeur. Il s’agit d’un concept général incluant tant des situations admissibles, que des situations non admissibles.

Qu’est-ce que le travail des enfants dans le travail domestique?

Le travail des enfants dans le travail domestique fait référence au travail réalisé par des enfants en-dessous de l’âge minimum applicable (pour les travaux légers, les formes non-dangereuses de travail à plein-temps), dans des formes dangereuses de travail ou dans une situation proche de l’esclavage.

Peut-on considérer les tâches ménagères réalisées par les enfants dans leur propre maison comme du travail domestique?

Les tâches ménagères effectuées par les enfants dans leur propre foyer, dans des conditions raisonnables et sous la surveillance de proches, sont une partie intégrante de la vie de famille et du développement personnel, c’est-à-dire quelque chose de positif. Cependant, il y a des préoccupations au sujet de certaines situations où ces charges de travail peuvent interférer avec l’éducation des enfants ou être excessives, dans de tels cas, ces situations pourraient être équivalentes à du travail des enfants. Les enfants effectuant des tâches ménagères dans leur propre foyer, et les enfants impliqués dans le travail domestique (dans le foyer d’un tiers) peuvent effectuer des tâches semblables. Cependant, dans le premier cas, l’élément de la relation de travail n’existe pas, ainsi donc on ne doit pas faire référence à ces situations comme étant du travail domestique des enfants.

Pourquoi le travail domestique des enfants est-il un phénomène «caché» et pourquoi est-ce si difficile de s’y attaquer?

Ce phénomène est souvent caché et difficile à combattre en raison de ses liens avec des modèles culturels et sociaux. Dans de nombreux pays, le travail domestique des enfants est non seulement accepté sur le plan social et culturel, mais il est aussi perçu de manière positive comme un type de travail protégé, non stigmatisé, et préféré à d’autres formes d’emploi, en particulier pour les filles. La perpétuation des rôles et responsabilités traditionnellement dévolus aux femmes, au sein et à l’extérieur du foyer, de même que la perception du service domestique comme un «apprentissage» des filles pour leur vie d’adulte et pour le mariage, contribuent également à la persistance du travail domestique parmi les formes du travail des enfants.

Quelles sont les causes profondes de ce phénomène?

Le travail des enfants a de nombreuses causes profondes mais, de manière générale, nous pouvons en distinguer deux types. Il s’agit premièrement de l’ensemble des facteurs qui poussent un enfant à travailler, tels que la pauvreté et sa féminisation, l’exclusion sociale, le manque d’instruction, la discrimination fondée sur le genre ou l’ethnie, la violence subie par les enfants dans leur propre foyer, le déplacement, l’exode rural et la perte des parents du fait d’un conflit et/ou d’une maladie. En second lieu, il s’agit des facteurs qui créent une demande pour le travail domestique des enfants, tels que le creusement des inégalités sociales et économiques, la servitude pour dette, une perception selon laquelle l’employeur serait simplement une famille élargie offrant par conséquent aux enfants un environnement protégé, le besoin croissant pour les femmes d’avoir un «substitut» domestique qui permette à un plus grand nombre d’entre elles d’accéder au marché du travail, et l’illusion selon laquelle le service domestique donnerait aux enfants une chance de s’instruire.

Quels sont les dangers auxquels font face les enfants travailleurs domestiques?

Les dangers liés au travail domestique des enfants nous préoccupent gravement. Le BIT a identifié plusieurs dangers auxquels les travailleurs domestiques sont particulièrement exposés et la raison pour laquelle il peut être considéré comme l’une des pires formes de travail des enfants. Les risques les plus répandus auxquels s’exposent les enfants dans cette activité concernent: des journées de travail longues et éprouvantes, l’usage de produits chimiques toxiques, le transport de lourdes charges, le maniement d’ustensiles dangereux comme des couteaux, des hachoirs, des casseroles brûlantes, un logement et une nourriture insuffisants ou inappropriés, des traitements humiliants ou dégradants, y compris des violences verbales ou physiques, et des abus sexuels. Les risques sont démultipliés lorsque les enfants vivent au domicile de leur employeur. Ces dangers doivent être appréciés dans un contexte de privation des droits fondamentaux de l’enfant, tels que par exemple l’accès à l’éducation et aux soins de santé, le droit au repos et aux loisirs, au jeu et à des activités récréatives, le droit d’être protégé et d’avoir des contacts réguliers avec ses parents ou ses semblables. Ces facteurs peuvent avoir un impact physique, moral et psychologique irréversible sur le développement, la santé et le bien-être des enfants.

Quelle est l’interaction entre les conventions nº 138 et nº 182 de l’OIT sur le travail des enfants et la Convention nº 189 concernant le travail décent pour les travailleurs domestiques?

La nouvelle Convention n° 189 complète les dispositions de la Convention nº 138 sur l’âge minimum et la Convention nº 182 sur les pires formes de travail des enfants de l’OIT.
La Convention nº 189 prévoit explicitement que les États Membres de l’OIT devraient fixer un âge minimum pour les travailleurs domestiques, qui soit cohérent avec les dispositions des Conventions n° 138 et n° 182, et ne soit pas inférieur à l’âge minimum établi par les lois et les réglementations nationales pour les travailleurs en général.
La Recommandation nº 201 renforce le tout en appelant à identifier, à interdire et à éliminer les travaux dangereux pour les enfants et à mettre en œuvre des mécanismes pour suivre la situation des enfants qui travaillent comme domestiques.
Les enfants impliqués, dès leur plus jeune âge, dans le travail des enfants dans le travail domestique n’ont généralement pas eu accès, ou insuffisamment, à l’éducation. De même, les enfants travailleurs domestiques au-dessus de l’âge minimum légal ont une moindre chance de poursuivre leurs études. La C189 invite donc les États Membres à prendre des mesures, pour garantir que le travail accompli par les travailleurs domestiques de moins de 18 ans, ayant dépassé l’âge minimum d’accès à l’emploi, ne les prive pas de l’éducation obligatoire ou n’interfère pas avec leurs possibilités de poursuivre leurs études ou leur formation professionnelle.

Combien d’enfants sont impliqués dans le travail domestique et combien sont en situation de travail des enfants dans le travail domestique?

  • 17,2 millions d’enfants sont impliqués dans le travail domestique, rémunéré ou non, chez un tiers ou employeur;
  • parmi eux, 11,5 millions sont dans le travail des enfants, dont 3,7 millions dans une situation de travail dangereux (soit 21,4% de tous les enfants travailleurs domestiques);
  • et 5,7 millions, surtout des adolescents, sont impliqués dans un travail autorisé, mais ont besoin d’être protégés des abus et qu’on leur fournisse un travail décent;
  • de plus, un nombre indéterminé se trouve dans le travail domestique comme résultat du travail forcé et de la traite. En 2012, l’OIT a produit des estimations mondiales sur le travail forcé. Sur un total de 20,9 millions de travailleurs forcés, les enfants âgés de 17 ans et moins représentent 26% de toutes les victimes du travail forcé (soit 5,5 millions d’enfants). Alors que le nombre spécifique d’enfants dans le travail forcé et victimes de traite à des fins de travail domestique demeure inconnu, les données existantes semblent indiquer l’existence d’un nombre significatif d’enfants impliqués dans la servitude pour dettes, victimes de traite ou en situations de servitude;
  • 67,1%, soit la grande majorité des enfants travailleurs domestiques, sont des filles;
  • 65,1% des enfants travailleurs domestiques sont âgés de moins de 14 ans: 7,4 millions ont entre 5 et 11 ans et 3,8 millions ont entre 12 et 14 ans;
  • le travail domestique touche toutes les régions.
Pour de plus amples informations, veuillez consulter la fiche thématique "Travail domestique des enfants: estimations mondiales 2012".

D’où proviennent les estimations sur le travail domestique?

En dépit d’un certain nombre de restrictions pour identifier complètement toutes les situations de travail caché, certaines des enquêtes sur les ménages, utilisées dans les estimations mondiales de l’OIT sur le travail des enfants de 2012, ont fournit d’importantes informations quantitatives sur le travail domestique des enfants - permettant de faire des estimations mondiales du nombre d’enfants travailleurs domestiques.

Quelle est la solution au travail des enfants dans le travail domestique et en vue de protéger les jeunes travailleurs en âge légal de travailler?

Il n’y a pas de recette magique, les problèmes soulevés par le travail des enfants dans le travail domestique et en vue de protéger les jeunes travailleurs domestiques requièrent une approche complémentaire dans plusieurs domaines et à plusieurs niveaux, parmi lesquels:
  • le développement d’une visibilité statistique et une amélioration des connaissances actuelles sur le travail domestique des enfants pour mieux identifier le travail des enfants et l’emploi des jeunes dans le travail domestique;
  • la sensibilisation et la promotion en vue de changer les attitudes sociales et de réagir à l’acceptation encore largement répandue du travail des enfants dans le travail domestique et à la croyance des employeurs et des parents, que ces situations représentent un environnement protecteur et sain pour les enfants, en particulier pour les filles;
  • la promotion de la ratification et de la mise en œuvre des Conventions n° 138 et n° 182 sur le travail des enfants et de la Convention n° 189 concernant le travail décent pour les travailleurs domestiques;
  • l’adoption d’actions législatives et politiques pour mettre un terme au travail des enfants et pour protéger les jeunes travailleurs domestiques:
    • fixation d’un âge minimum claire;
    • identification, prohibition et élimination du travail domestique dangereux;
    • adoption des mesures de protection concernant les conditions de vie et de travail des jeunes travailleurs domestiques. Ceci comprend une limitation stricte de leurs horaires de travail, l’interdiction du travail de nuit, des restrictions relatives au travail qui est excessivement exigeant physiquement ou psychologiquement, et la mise en place de mécanismes, ou le renforcement de ceux déjà existant, pour assurer le suivi de leurs conditions de vie et de travail;
    • mise en place de mécanismes de plainte accessibles, accès facilité à la justice et à des réparations légales; des pénalités appropriées;
    • inspection du travail efficace (avec un accès facilité aux lieux de travail).
  • accorder une attention particulière à la vulnérabilité des enfants migrants face aux conditions de travail abusives dans le travail domestique;
  • l’officialisation des rapports d’emploi dans le travail domestique par le biais de contrats écrits ainsi que l’adoption et l’utilisation de contrats de travail types;
  • améliorer le rôle des partenaires sociaux, extension de la liberté d’association et reconnaissance effective du droit à la négociation collective dans le travail domestique; y compris la reconnaissance aux jeunes travailleurs domestiques en âge légal de travailler, de leur droit de rejoindre ou de former des syndicats;
  • obtenir le soutien des employeurs des travailleurs domestiques;
  • apporter du soutien aux enfants travailleurs domestiques pour lutter contre le travail des enfants et favoriser l’emploi décent des jeunes;
  • soutenir le mouvement mondial contre le travail des enfants;
  • s’engager avec les enfants travailleurs domestiques en tant qu’agents du changement;
  • rassembler des forces pour promouvoir un travail décent pour tous: Mieux ensemble.

Qui fait quoi?

La coopération est fondamentale pour une action efficace en faveur de l’abolition du travail des enfants dans le travail domestique, pour protéger les jeunes travailleurs contre des conditions de travail et d’emploi abusives et pour promouvoir le travail décent pour tous les travailleurs domestiques. Les gouvernements, les organisations d’employeurs et de travailleurs, les groupes de la société civile et les organisations internationales ont joué un rôle essentiel en donnant une plus grande visibilité aux questions et problèmes des domestiques.