Journée mondiale contre le travail des enfants 2003

Le trafic des enfants est l'une des pires formes de travail des enfants. Le phénomène est difficile à chiffrer mais on estime qu'il fait chaque année 1,2 million de victimes - filles et garçons - exploitées dans l'agriculture, les mines, les usines, les conflits armés ou le commerce du sexe.

Le trafic des enfants est l'une des pires formes de travail des enfants. Le phénomène est difficile à chiffrer mais on estime qu'il fait chaque année 1,2 million de victimes - filles et garçons - exploitées dans l'agriculture, les mines, les usines, les conflits armés ou le commerce du sexe.

Les projecteurs du monde entier sont désormais braqués sur cette terrible forme d'assujettissement des enfants. Le 12 juin 2003, qui sera la deuxième Journée mondiale contre le travail des enfants, l'OIT attirera plus particulièrement l'attention sur le trafic des enfants - sous toutes ses formes et où qu’il se produise - afin qu'il soit aboli.

Il est grand temps d'agir. Si rien n'est fait, le nombre des victimes augmentera.

Quelques témoignages d'enfants victimes de trafic

Jockey de chameau au Moyen-Orient: Shahid du Bangladesh

Shahid est maintenant âgé de 12 ans et il a été enlevé illégalement alors qu'il avait 7 ans. Son père est mort quand il en avait 5. Il vivait avec sa famille à Dholaikhal, Jatrabarim, où son père gagnait sa vie comme chauffeur de camion. Son père avait deux épouses, et la mère de Shahid travaillait dans une usine de vêtements.

«Il y a cinq ans, un jour, alors que je jouais devant ma maison, un homme est venu et a parlé avec ma demi-soeur. J'ai découvert, plus tard, que cet homme était un kidnappeur. Ma demi-soeur l'a aidé à m'envoyer à Dhaka, et j'ai aussi découvert qu'elle m'avait vendu à cet homme.

A Dhaka, j'ai été gardé dans une maison pendant quatre mois dans la région de Mirpur. Je ne pouvais pas sortir où que ce soit. Pendant que j'étais là-bas, des gens ont modifié mon passeport. Puis nous sommes allés en Inde en traversant la frontière de Comilla, puis à Kolkata et à Bombay. A Bombay, j'ai été remis à deux autres hommes. La nuit suivante, ils m'emmenèrent à l'aéroport de Bombay et là encore me remirent à une dame indienne. Cette dame et moi, nous sommes arrivés à Dubai le lendemain matin où j'ai aussi été vendu à un homme arabe pour la somme de 30,000 Dinars. La dame était une prostituée. L'homme arabe m'emmena dans sa maison et j'ai été engagé comme jockey de chameau.

Le propriétaire arabe possédait un troupeau de 50 à 60 chameaux de course. Au début, mon maître me demanda de surveiller les chameaux et il engagea aussi un moniteur pour me former en tant que conducteur de chameau. Après avoir reçu une formation intense, j'ai commencé à travailler comme jockey de chameau dans les courses de compétition de chameaux. Je n'étais pas payé pour mon travail, mais mon maître avait l'habitude de me donner un pourboire de 100 à 200 Dinars si le chameau gagnait la course. Il ne me donnait pas beaucoup à manger, et j'étais toujours très affamé. Quand je demandais un peu plus de nourriture, on me frappait; je pesais seulement 20 kilos. Quand j'ai grandi un peu, je n'étais plus assez mince parce qu'avec ce travail de jockey je ne pouvais dépasser ce poids de 20 kilos. Je devins donc inutile pour ce monsieur arabe, qui demanda à quelqu'un de me renvoyer au Bangladesh.

Pour renter, nous avons repris la même route que celle que nous avions prise pour venir au Moyen-Orient, l'homme me ramena en Inde et me laissa près de la frontière de Comilla. Alors que je traversais la frontière du Bangladesh, la police m'arrêta et m'envoya en prison à Comilla. Je suis resté dans cette prison pendant un mois et demi, puis finalement je suis allé dans un refuge grâce à l'aide d'une organisation non gouvernementale locale.»

Shahid vit maintenant dans ce refuge depuis plus d'une année. Il va à l'école et est au premier niveau. Il pratique le chant, il danse et fait du théâtre, il joue au football, au cricket et aime aussi regarder la télévision. Sa mère vient lui rendre visite dans ce centre tant que son cas n'est pas réglé par le tribunal. Elle essaie de suivre l'affaire de son fils qui lui manque en lisant les journaux. Shahid aimerait devenir un artiste. Plus tard, quand il aura terminé ses études, il aimerait travailler en tant que tel, prendre soin de sa mère et lui construire une maison.

Une fugue l'entraîne dans la prostitution en Inde:

Sunita du Nepal Agée de 15 ans, Sunita est une jeune fille qui appartient à la caste des Brahmas. Son niveau d'étude correspond au 5e degré; elle a une belle-mère et une demi-soeur plus jeune qu'elle. Son père était chauffeur de bus à la Compagnie Shajha. Après son décès, sa belle-mère la retira de l'école.

«Mon père m'aimait beaucoup, par contre ma belle-mère me détestait. Elle ne voulait pas que j'aille à l'école. Nous avions notre maison, notre terre, mais, quelquefois nous devions acheter des céréales.

Je travaillais comme aide à la maternité de l'hôpital où j'ai rencontré Bishal de qui je suis tombée amoureuse. Nous avons commencé à nous fréquenter et à vivre ensemble dans son appartement pendant quelques semaines. Bishal vivait avec son frère aîné et sa belle-soeur.

Peu à peu Bishal me présenté à Rudre, à Dinesh puis à d'autres hommes. Bishal me présenta un vieil homme comme étant son oncle. Bishala dit alors que nous devions aller à Darjeeleing pour visiter sa soeur et lui emprunter l'argent nécessaire pour acheter du terrain à Kathmandou. Nous sommes restés à Passhupati Nagar pendant deux jours, et Bishal m'a demandé de dire que nous étions mariés si la police nous interrogeait. A cette époque, j'avais seulement 14 ans. A Darjeeling, ils me laissèrent dans une chambre sombre. Je n'ai plus jamais revu Bishal, et on m'a dit que j'avais été vendue à une maison close pour 90,000 roupies.

J'ai commencé à travailler dans cette maison close le jour suivant. Je devais travailler de six heures du matin jusqu'à 11 heures de soir. Si je refusais de travailler, on me frappait brutalement. En moyenne, j'avais une vingtaine de clients par jour, et j'ai travaillé là pendant plusieurs mois. La tenancière ne m'envoyait jamais de clients népalais. Dans cette même maison, nous étions environ 30 à 35 filles à travailler.

Les clients n'utilisaient pas souvent les préservatifs et je suis tombée enceinte. La tenancière m'a forcée à avorter au bout de 7 mois de grossesse et j'ai dû continuer à satisfaire les clients. J'avais encore beaucoup de pertes de sang après l'opération, mais malgré cela j'étais obligée de continuer à faire ce travail sinon on ne me donnait rien à manger.»

Rudre amena encore six autres jeunes filles dans la maison close où Sunita était. Parmi elles, certaines étaient mariées et une mère d'un enfant. Son ami Kabita demanda à un de ses clients indiens réguliers de l'aider et avec son aide elles purent toutes sortir de la maison close.

Pour améliorer l'existence: Meyeza du Togo

Meyeza est la cadette d'une famille de 4 enfants. Elle vivait à Yoloum dans une localité située à 269 Km de Lomé. Elle était scolarisée et fréquentait le cours élémentaire deuxième année. Pendant les vacances scolaires 2001-2002, elle a été sortie de l'école par son père et remise à une togolaise vivant au Gabon en quête d'enfants domestiques. Comme la cinquante d'enfants de son âge, elle sera convoyée de son village vers Sokodé, puis Tchamba.

C'est lors de la traversée de la frontière Togo-Bénin, que le convoie a été détecté par des villageois. Mis au courant le comité local de Balanka intercepte le convoi avec l'appui du Poste de Gendarmerie de Tchamba. Avec l'appui de la Commission régionale d'accueil et de réinsertion sociale de la Région Centrale, Meyeza retrouve ses frères et soeur, sa mère et surtout son père qui interrogé sur son acte déclare «Comme vous pouvez constater, le toit de ma maison est totalement décoiffé. Il reste que cette pièce (partiellement décoiffée) qui nous sert d'abri. Les enfants dorment à même le sol. Je cultive, mais à peine je produit de quoi répondre aux besoins de ma famille. C'est pourquoi, lorsqu'on m'a proposé le travail au Gabon pour ma fille, j'ai tout de suite accepté. J'ai cru que ce serait une occasion pour améliorer notre existence.»